L’été est là, l’année s’achève, nos partenaires burkinabés sont repartis ce qui nous invite à un petit bilan au Cridev.
Une année très riche en rencontres, en réflexions en formations et en actions. Merci à tout·es celleux qui sont venu·es échanger, agir, partager avec nous !
Le Cridev questionne constamment son positionnement politique. La thématique sur les discriminations racistes, sexistes et de classe a ouvert de nombreuses perspectives et a contribué à asseoir encore un peu notre projet politique.
Pour mieux agir contre ces discriminations, ces oppressions, il est nécessaire de comprendre ce qui les produit, les soutient, ce qui les alimente. Quelles mécaniques sont en œuvre dans nos comportements, nos discours, nos préjugés qui permettent de créer des différences entre les personnes, de créer des catégories dans lesquelles ranger les individu·es ? Comment ces catégories sont utilisées pour dominer, oppresser, discriminer certaines personnes, certains groupes ou certaines communautés ?
Pour cela, nous avons pris le temps de nous former, d’étudier, d’interroger ce qui fait système dans les rapports de domination et la reproduction des discriminations. Mais surtout, il nous a semblé nécessaire d’écouter ce qu’ont à dire les personnes qui vivent une/plusieurs discriminations, les premiers et premières concerné·es. La perception et le vécu d’une discrimination ou d’une oppression ne sont pas les mêmes selon que l’on soit femme, blanc·he, hétéro, homo, trans, bi, intersexe, français·e, burkinabé… Si je suis une femme, je suis concernée par le sexisme. Je le vis directement, il influe sur ma vie au quotidien. Mais si je suis une femme blanche, je ne vis pas le racisme de la même façon que le sexisme puisqu’il ne vient pas s’imposer à moi dans le quotidien, il ne m’empêche pas de trouver un travail, obtenir un logement, accéder à mes droits.
De fait, nous n’avons pas toujours la même place et le même rôle à jouer pour lutter contre les discriminations. Trouver sa place et ce rôle, c’est se situer, dire d’où l’on parle. Sommes-nous des allié·es, des premiers, premières concerné·es, des oppresseur·es inconscient·es ? Répondre à ces questions permet de réduire le risque de reproduire soi-même la domination que l’on combat ou d’autres.
Ainsi, le Cridev s’est affirmé comme un lieu ressource sur ces différentes questions et l’année a été notamment guidée par une réflexion sur les féminismes. Les actions sont venues concrétiser les idées. Nous pouvons citer parmi celles-ci, des Soirées Causeries sur la parole aux premier·es concerné·es dans la solidarité internationale, le classisme et les personnes LGBTQI+. Elles ont permis de réfléchir et de faire s’exprimer de nombreuses personnes.
Désormais, nous avons envie de mettre l’accent sur les actions et sur l’interpellation publique ainsi que de poursuivre le travail de décloisonnement dans la compréhension et l’action sur les oppressions. Nous souhaitons que l’année à venir soit l’occasion d’interroger toujours plus les termes que nous employons et qui nous définissent, et sur ce que véhiculent ces mots (universalisme, solidarité(s) internationale(s), luttes…).
Ce travail permettra d’ouvrir sur deux lignes directrices pour l’année prochaine :
– s’ouvrir, connaître différentes résistances, actions et luttes contre les rapports de domination dans d’autres lieux, pays, espaces et partager si possible autour de ces luttes. Il s’agit d’interroger les interdépendances mondiales entre les oppressions vécues ici et là bas ;
– travailler ensemble les différentes discriminations/oppressions, travailler les liens entre les oppressions vécues dans le monde et tendre vers une approche intersectionnelle.
Les discriminations existent partout dans le monde, quelles déclinaisons ont-elles selon les lieux, les pays ? Qu’est ce que faire face au sexisme en France, en Indonésie, au Japon ? Pourquoi certain.es voyagent, s’expatrient alors que d’autres migrent, s’exilent ? Qu’est-ce que lutter pour les droits des homosexuel·les au Nicaragua ou en Belgique ?
Existe-il des articulations entre ces luttes dans les différents lieux ? Faut-il les articuler, pourquoi ?
On entend parler de « convergence des luttes », mais qui convergent pourquoi ? Qui décide de converger ? Quels écueils, risques, manipulations, invisibilisations, oppressions derrière cette convergence ? Au nom de quoi/qui parlent les « valeurs universelles » ?
Voilà un aperçu de l’état de nos réflexions actuelles. Merci à tou.s.tes celleux qui ont fait vivre le Cridev cette année et ont permis d’avancer sur ces questionnements. A bientôt à la rentrée pour poursuivre tout cela avec vous. Bel été à toutes et à tous !
Édito écrit par Hélène, Laure et Judi – Co-président-e-s et bénévole du Cridev.
Pour aller plus loin :
Intersectionalité : émission « Les Héroines »
Canal B, 22/06/2016
Mécanique raciste : La mécanique raciste
Pierre Tevanian, La Découverte, avril 2017
Conférence gesticulée : « Mes identités nationales »
Pablo Seban, 2013
Point de vue situé : Éducation Populaire et Féminismes
Collectif, 2016