Partage de découvertes faites pendant le festival de films documentaires de Douarnenez 2019.
« Le colonialisme n’est pas une machine à penser, n’est pas un corps doué de raison. Il est la violence à l’état de nature et ne peut s’incliner que devant une plus grande violence »
Frantz Fanon, Les Damnés de la Terre, 1961
Coup de cœur glaçant pour ce film documentaire qui nous renvoie frontalement à la violence du processus de colonisation occidental. Il pose immédiatement la question retour à savoir, la nécessité de la violence dans la résistance et les luttes de libération.
À travers 9 chapitres, le film revient sur les luttes pour la liberté et l’indépendance de différents pays du continent Africain dans les années 1960, 1970 et 1980. Images d’archives (de la télé suédoise) et des entretiens viennent illustrer la pensée de Frantz Fanon, dont des extraits du livre « Les Damnés de la Terre », lus par l’artiste afro-améicaine Lauryn Hill constituent l’ensemble des commentaires en voix-off du film.
La préface du film par Gayatri Chakravorty Spivak permet de garder à l’esprit tout au long du film les liens entre domination coloniale et domination patriarcale. Les violences sexistes faisant partie intégrante du processus colonial : viol comme arme de guerre, appropriation sexuelle du corps des femmes colonisées… Le documentaire insiste peu ensuite sur ce point. Pourtant la présence des femmes dans les luttes armées de libération et leurs paroles, ici retransmises, montre que la résistance a été organisée/ portée par toutes et tous et une contestation subversive de ce dit « monopole masculin de la violence ».
Alternativement mis face à face avec des colonisé-e-s en lutte ou des colons, le documentaire montre la violence des situations, la violence comme processus de domination, d’exploitation et met en avant la nécessité/l’importance de la résistance armée (#stop à la symétrisations des rapports de dominations) face à la domination coloniale « parce qu’il n’y a pas d’autre réponse possible à une absence absolue de réponse et à un exercice absolu de la violence érigée en loi de la part des colons » – F.Fanon (ib.). Les 9 « scènes d’autodéfense anti-impérialiste » nous emmènent ainsi successivement en Angola avec le Mouvement Populaire de Libération de l’Angola (MPLA), au Mozambique avec le Front de libération du Mozambique (FRELIMO), au Zimbabwe, en Guinée-Bissau et au Burkina Faso avec un extrait d’entretien de Thomas Sankara.
Concerning Violence donne peu d’éléments de contexte et d’éléments historiques pour chacune des situations exposées. Le choix, notamment esthétique avec la densité des images d’archives, place au centre du documentaire la parole des personnes concernées (résistant-e-s ou colon-ne-s). Il nous revient donc ensuite d’aller chercher par nous-mêmes plus d’informations sur les luttes de libération évoquées. Ce documentaire fait un bel écho à celui de R. Vautier, Afrique 50.
Pour aller plus loin
« Fiche technique du film », Les Mutins de Pangée
« Göran Hugo Olsson, Concerning Violence », Anne-Charlotte Millepied, Lectures, 23/06/2015
« Bande annonce », YouTube, 31/01/2014
« Festival de cinéma de Douarnenez », Site officiel
« Le pacifisme comme pathologie », Derrick Jensen, partage-le.com