Alors que nos loulous franchissent, la boule au ventre, la grille de l’établissement scolaire en vue de rentrer dans une nouvelle classe, on peut se questionner sur la nôtre, de rentrée des classes… Sommes-nous plutôt école privée, ou école publique ? Chaussures bateau de marque, sandales de chez Emmaüs ou baskets premier prix ? Option allemand/latin, spé math ou sport ?! Vacances à la maison, colonie ou voyage autour du monde?
En 2017, le paysage des classes sociales semble bien flou ! Il semble que nous sommes toutes et tous de la classe moyenne et il n’y a que d’elle dont on parle. Pourtant bien présentes dans nos relations et nos constructions sociales, les classes sociales organisent encore et toujours une hiérarchie sociale inconsciente et violente. On parle ici de mépris de classe. Ce mépris nous a été récemment resservi par notre Président qui semble faire voir deux types de personnes que l’on peut croiser dans une gare : ceux « qui réussissent » et ceux « qui ne sont rien »…
Mais qui sont ces gens « qui ne sont rien »? Devrions-nous comprendre : les chômeurs-euses, les précaires, celles et ceux qui n’auraient pas l’ambition de façonner le monde, de monter une start –up, les employées-s, les ouvriers et ouvrières, le petit personnel ? « La France d’en bas » de Rafarin? Il est clair que l’opposition prolétariat/ bourgeoisie de Karl Marx n’a plus grand chose à voir avec la réalité du 21e siècle… Quoique… ! En tout cas, une grille de lecture non exhaustive mais pertinente que nous livre Anthony Pouliquen dans sa conférence gesticulée « Une autre histoire des classes sociales », décortique cette grande et unique « classe moyenne », où tout le monde se sent si bien… Il insère entre classe populaire (ouvrier-ère, employé-e, catégorie intermédiaire…) et bourgeoisie (les grandes-s patronnes-s, les hommes et femmes politiques, les rentières-ers…), la petite bourgeoisie intellectuelle et la petite bourgeoisie économique. Elles sont, d’après lui, réciproquement, plutôt de gauche et plutôt de droite.
Les relations entre les trois premières classes (qui représentent la majorité de la population) déterminent l’organisation de la société. En effet, l’alliance de la classe populaire avec la petite bourgeoisie intellectuelle permettrait de construire un rapport de force face aux ambitions d’accumulation économique de la bourgeoisie. C’est le bloc historique, composé des deux cœurs sociologiques de la gauche qui se mettent à battre ensemble pour permettre la transformation sociale.
Mais alors ! Si c’est si simple, pourquoi les grandes mobilisations sociales de ces dix dernières années n’ont récolté que des échecs au profit du patronat et d’une politique de droite ? Pourquoi les gouvernements ne se soucient plus de la voie de la rue, de l’opinion publique, du point de vue de leurs ”partenaires sociaux” ?
Parce que l’alliance des classes, on en est loin ! Afin d’affirmer l’appartenance à sa classe, chacun-une se permet, en toute naïveté de rejeter celle à laquelle il/elle n’appartient pas. Rejeter ou mépriser ? En effet, le mépris de classe est une construction sociale et non un simple défaut (cf article : Expliquez-moi le mépris de classe ordinaire, Max Bourdieu, Simonae).
Alors pour cette rentrée 2017, le CRIDEV propose de se questionner sur les stéréotypes véhiculés et entretenu dans le but de se distinguer. Se distinguer du « Mainstream », décrire certaines pratiques et goûts artistiques comme des “trucs de ploucs” ou de “beauf”. Le mépris de classe, tout comme le sexisme et racisme, est partout, et particulièrement derrière nos yeux et nos paroles…
Co-écrit par : Julia, administratrice du CRIDEV, Pierrot de Chahut, Solène du DU Education Populaire et Transformation Sociale